Vous vous demandez certainement si c’est une fiction ?
Un rêve ?
Où ça ?
Mais en Belgique, pardi !
« Et si nous y allions ? »
Moins de 100 km nous séparent de la ville du bonheur, depuis Dilbeek … et nous ne le savions pas !
Jusqu’au jour où j’ai lu, dans le SoSoir du mois de mars 2025, les résultats de la vaste enquête sociale menée par l’Université de Gand sur les villes de Belgique où les habitants se sentent les plus heureux, les plus épanouis.
Partons donc ensemble à la découverte de la ville lauréate, qui, dans cette contrée campagnarde du XIIe siècle, répondait
au nom évocateur de :
« H A S L U T H » ou « bosquet de noisetiers »
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Pour l’origine de ce toponyme, je vous livre une des explications des étymologistes du XIXe siècle qui ont proposé la correspondance identitaire avec l’ancien mot germanique « hasel » = noisetier. Sans oublier le toponyme originel du vocable agraire gallo-romain « hassetelu » (vaste terrasse, terre sèche), puis « hasstlu » ou « hasslu », dont l’évolution linguistique expliquerait le dérivé du nom en
H A S S E L T
– Ah bon ! La ville du bonheur et des noisettes, alors ?
– Oui ! Nous allons le découvrir !
1. Les premiers pas dans la ville : l’Office du Tourisme
Tout commence dans la Maastrichterstraat, au n° 59 ! Nous sommes à l’Office du Tourisme ! Nous apprécions l’accueil souriant et les informations données en français. Les circuits sont thématiques (routes de l’art et du goût, des musées, du passé historique) et je nous ai sélectionné un itinéraire mixte ludique et historique, d’environ 5,5 km, dans le centre-ville piétonnier.

Une histoire de noisettes : à vous de les chercher ! Elles sont partout cloutées sur le sol et leur pointe désigne la direction à suivre dans le parcours. Un vrai jeu de piste ! Ouvrons l’œil et amusons-nous !

Le jeu commence. Quelques pas pour traverser la Capucienenplein et nous cherchons la plus grande œuvre de street art de la ville, qui en compte plus de 100. Hasselt ou la beauté à portée de tous ! L’art présent partout et pour tous. Et si c’était cela qui rend les gens heureux ?

Juste face à nous ! L’œuvre est monumentale ! Sam Bates, un artiste australien, alias Smug, a représenté une jeune femme de sa connaissance, sur 450 m² de surface sur un immeuble à appartements. Dans des couleurs végétales, elle nous apparaît gracieuse, céleste, mais aussi, si réelle que nous ne pouvons la quitter du regard. Personne n’ose bouger, quand quelqu’un crie : « Je l’ai trouvée ! Je l’ai trouvée ! La noisette ! ».
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De l’autre côté de la rue, la pointe de la noisette nous dirige vers une statue-fontaine en bronze aux formes généreuses : le Borrelmanneke (= l’homme qui boit, 1981), du sculpteur Laurent Boonman (originaire des Pays-Bas).
Un malicieux clin d’œil aux activités des distillateurs de genièvre et à la symbolique du cycle économique de cette industrie qui fut une des richesses d’Hasselt.
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En effet, la drêche du grain distillé servait de nourriture aux bœufs et aux porcs dont le fumier engraissait le sol sablonneux campinois et faisait pousser les céréales, matière première du genièvre. Et le cycle recommençait ! Toute la ville est ainsi « animée » par de nombreuses statues personnalisant les quartiers de façon ludique pour souligner des éléments du passé. La place de l’art dans tout Hasselt est exceptionnelle ! Et si c’était cela qui rend les gens heureux ?
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Nous continuons tout droit vers le Vismarkt (ancienne Place du Marché aux Poissons) et déjà le clocher de la Cathédrale Saint-Quentin, avec ses 62 m de haut, nous accroche ! Encore une noisette ! Nous sommes sur le bon chemin ! Et le carillon retentit ! Avec ses 47 cloches, depuis 1752, il est considéré comme le meilleur du pays ! Sa mélodie, « The Singing Tower » enveloppe le centre-ville de douceur. Nous prenons notre temps pour l’écouter et chacun a l’impression d’avoir quitté « les turbulences » de sa propre ville et d’être arrivé dans un havre de paix.
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Et si c’était cela qui rend les gens heureux ?
2. Au cœur de la vieille ville
La Cathédrale Saint-Quentin : importante église élevée au rang de cathédrale en 1967, quand le diocèse d’Hasselt fut créé.
L’architecture extérieure : je vous laisse découvrir les beautés de la cathédrale : ses styles successifs, du roman (seul vestige : le soubassement de la tour, XIIe s.) au gothique (la tour Ouest) ; ses sculptures de belle facture ; ses gargouilles grimaçantes (rôle purificateur : évacuer l’eau de l’édifice et chasser le péché hors de ses murs)… ou encore son clocher dont la tour, utilisée aussi comme tour de guet, est la plus belle et la plus décorée du Limbourg.
L’architecture intérieure et les trésors de la cathédrale

La lourde porte s’est refermée sur notre siècle et nous faisons un bond dans le passé, au temps du gothique. La perspective sur la voûte du XVe siècle est unique. Une forêt de colonnes, à perte de vue ! Pas de chapiteau, juste des colonnes avec un encadrement duquel partent en hauteur tous les arcs brisés qui soutiennent la voûte. La cathédrale possède deux trésors : l’hostie qui saigne de Viversel (voir la légende du XIVe s. de l’hostie miraculeuse) et les 47 crânes-reliques de l’abbaye de Herkenrode (voir la légende liée à Sainte Ursule).
Et pour les sportifs, 168 marches à gravir dans la tour les mèneront du rez-de-chaussée à un panorama à couper le souffle ! Qui est tenté ?
Note historique : le passé historique lie la fondation de cette 1ère église à la ville elle-même et à son développement. Hasselt est fondée dans le courant du VIIe s. sur le Helbeek, un affluent du Démer. C’est au cœur même de la vieille ville qu’au VIIIe s. cette 1ère église fut construite. Il a fallu compter cinq siècles de travaux pour l’achèvement de la construction. Et, au XIIIe s., Hasselt est alors reconnue comme une des « bonnes villes » du comté de Looz (ou Loon/Loën en flamand, graphies préservées longtemps dans le monde germanique) dont les frontières correspondent environ à celles de l’actuel Limbourg.

Sculpture en bronze de Marc Cox à la Fruitmarkt : le comte Arnoul IV de Looz (Graaf van Loon) qui, en 1232, après avoir confirmé le statut de « cité » d’Hasselt, en fit la capitale économique et administrative du comté. Et dans son développement, la ville a tiré profit de sa proximité avec le château comtal et avec l’importante abbaye de Herkenrode à Kuringen.
La Grand-Place
Aux siècles passés, cette place s’appelait le Marché aux grains parce que les distillateurs de genièvre venaient s’y fournir en céréales. Le marché des denrées s’y tenaient deux fois par semaine.

Centre névralgique et théâtre de la vie publique, il fait bon de s’y promener parmi les Hasseltois ou de s’installer quelque part ? A une terrasse ?
Ou, comme ce couple assis sur une des nombreuses banquettes de la place qui nous invite au repos : « Hallo, nous sommes Hendrik et Katrien, le légendaire premier couple d’habitants. C’est le sculpteur hasseltois Marc Cox qui nous a donné la vie en 1989. En regardant au loin, vers le futur, nous symbolisons la jeunesse tournée vers l’avenir. Restez assis avec nous encore un moment pour écouter le carillon ! C’est d’ailleurs le nom donné à notre statue ».
Et, à cet instant, le carillon nous envoie ses jolies notes de musique… Hasselt n’a pas fini de nous étonner et de nous séduire ! Quelqu’un me demande si c’est bien la statue qui nous a parlé ?

Photos : Guy Delsaut, 2017 , Statues Quo
https//statuesquo.blogspot.com.
Hasselt nous fait rêver ! Et si c’était cela qui rend les gens heureux ?
Une maison à ne pas rater, au coin de la Kapelstraat : témoignage de l’art mosan, elle porte des colombages en croix de Saint André et à l’angle du 2e étage, une main gantée brandit une épée ! Impressionnant !

C’est une ancienne auberge des années 1650, Het Sweert (l’Epée) transformée en pharmacie depuis 1713 et toujours en activité. Qui a besoin d’une aspirine ? A remarquer encore, un bâtiment construit il y a plus de cinq siècles à l’angle de la Koning Albertstraat, la Halle aux draps. Le commerce du drap, à partir du XIIIe s., a fait la prospérité d’Hasselt. Ce tissu de laine dense et de grande qualité par son tissage était vendu dans toute l’Europe.
3. Les alentours de la Grand-Place
La Kapelstraat, rue pittoresque et une des plus anciennes artères d’Hasselt servant de voie de passage vers l’ouest, regorge de commerces et d’élégantes boutiques gourmandes. Un arrêt à l’atelier Cools au n° 27, pour s’approvisionner en « speculaas » et fondre pour ce délicieux biscuit tendre, un peu épais dont le goût des épices comme la cannelle, la cardamone, la noix de muscade, le gingembre, le clou de girofle, nous emmène pour un voyage vers l’Asie d’où les navigateurs hollandais au XVIIe siècle avaient rapporté dans leurs cargaisons ces précieuses épices. Et depuis, speculaas et spéculoos font craquer petits et grands, dans tout le pays ! Et si c’était cela qui rend les gens heureux ?
Accolée aux flancs de la basilique Virga Jessé, la terrasse d’une brasserie nous invite. Nous succombons au charme insolite du lieu et comme les Hasseltois, nous profitons de ce moment de convivialité et de détente. Qui veut un speculaas ?
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« Ce bon temps » qui nous est offert en parcourant Hasselt et cette joie de vivre sont une véritable ode au « carpe diem » du poète Horace et nous en ressentons tous les bienfaits…
Hasselt nous retient, mais nous devons la quitter ! Serait-ce pour mieux y revenir au début de l’année prochaine ?
(à suivre)
Chloé Bindels
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Sources :
– Office du Tourisme : Maastrichterstraat, 59 / visit@hasselt.be / Tél : 011 23 95 40
– Promenade historique dans la ville d’Hasselt : manuel de l’Office du Tourisme
– KunstRoute : itinéraire jalonné d’œuvres d’art
– Smaakmaker en Spraakmaker : itinéraire des musées et lieux de la gastronomie
– Le Guide du Routard : Belgique 2018, éditions Hachette
– Wikipédia: https://fr.wikipedia.org/wiki/Hasselt
Photos : Chloé Bindels — Dessins : Jessica De Mets